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CANARDS DOMESTIQUES.

compétents rattachent nos oies domestiques à l’oie sauvage, A. férus, dont les jeunes s’apprivoisent facilement[1], et sont domestiqués par les Lapons. Cette espèce, croisée avec l’oie domestique a produit, en 1849, au Jardin Zoologique, des métis parfaitement fertiles[2]. La partie inférieure de la trachée de l’oie domestique est, d’après Yarrell[3], quelquefois aplatie, et la base du bec est aussi parfois entourée d’un anneau de plumes blanches. À première vue, ces caractères sembleraient indiquer un croisement antérieur avec l’oie à front blanc, A. albifrons ; mais dans cette espèce l’anneau blanc est variable, et il ne faut pas méconnaître la loi des variations analogiques, en vertu de laquelle les individus d’une espèce peuvent revêtir certains caractères d’une espèce voisine.

Puisque l’action d’une domestication très-prolongée, paraît n’avoir que peu influencé les caractères de l’oie, voyons quelle est l’importance des modifications qu’on peut déceler chez elle. Elle a augmenté de taille et de fécondité[4], et varie en couleur du blanc au foncé. Plusieurs observateurs[5] ont remarqué que les mâles sont plus souvent blancs que les femelles, et deviennent presque invariablement blancs, lorsqu’ils sont vieux, ce qui n’est cependant pas le cas de la forme souche, l’A. férus. Ici encore, il peut y avoir un cas de variation analogique, car tous ceux qui ont traversé les détroits de Tierra del Fuego ou visité les îles Falkland, ont pu remarquer sur la grève le singulier spectacle du mâle blanc comme neige de l’oie de rocher (Bernicla antarctica), accompagné de sa femelle foncée. Quelques oies portent des huppes, et ont alors, ainsi que nous l’avons dit plus haut, la partie sous-jacente du crâne perforée. On a tout récemment formé une race dont les plumes de la partie postérieure de la tête et du cou sont renversées[6]. Le bec varie un peu de grandeur, et a une teinte plus jaune que

  1. Strickland, Ann. and Mag. of nat. Hist. (3e série), vol. III, 1859, p. 122, a élevé quelques jeunes oies sauvages, qui étaient par tous leurs caractères et leurs habitudes, identiques à l’oie domestique.
  2. Hunter, Essays (édité par Owen), vol. II, p. 322.
  3. Yarrell, British Birds, vol. III, p. 142, signale la domestication de l’oie par les Lapons.
  4. L. Lloyd, Scandinavian Adventures, 1851, v. II, p. 413, dit que l’oie sauvage pond de cinq à huit œufs, nombre bien inférieur à celui des œufs de l’oie domestique.
  5. Observation du Rev. L. Jenyns dans British Animals. Voir aussi Yarrell et Dixon dans Ornament. Poultry (p. 139), et Gardener’s Chronicle, 1857, p. 45.
  6. M. Bartlett a exposé le cou et la tête d’une oie ainsi caractérisée à la Zoological Society, Fév. 1830.