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Page:Darwin - De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication, tome 2, 1868.djvu/140

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INCONVÉNIENTS DE LA REPRODUCTION, ETC.

à force de ne se reproduire qu’entre eux, avaient fini par perdre leurs dispositions belliqueuses, et se laissaient hacher sur place sans faire de résistance ; en même temps leur taille s’était réduite au point qu’ils se trouvaient au-dessous du poids voulu pour concourir aux grands prix ; mais à la suite d’un croisement avec une autre famille, ils reprirent leur poids et leur courage primitifs. Comme on pèse toujours les coqs avant le combat, leur augmentation ou diminution de poids était bien réellement constatée. M. Clark ne paraît pas avoir apparié les frères et sœurs, le mode d’union qui est le plus nuisible ; et après beaucoup d’essais, il a reconnu que le produit du père et de la fille présentait une plus forte réduction de poids que celui de la mère et du fils. M. Eyton, qui est un grand éleveur de Dorkings gris, m’apprend qu’ils diminuent toujours de taille et perdent de leur fécondité, si on ne fait pas intervenir, de temps à autre, un croisement avec une autre souche. Il en est de même d’après M. Hewitt pour les Malais, au point de vue de la taille[1].

Un auteur expérimenté[2] remarque qu’un même amateur, comme on le sait du reste, maintient rarement longtemps la supériorité de ses oiseaux ; ce qui est incontestablement dû à ce que toute sa souche est de même sang ; il est donc indispensable de faire occasionnellement intervenir un oiseau d’un autre lignage. Cela n’est pas nécessaire pour ceux qui ont soin de tenir plusieurs familles séparées dans des stations différentes. Ainsi, M. Ballance qui élève des Malais depuis plus de trente ans, et a déjà, avec ses oiseaux, remporté plus de prix qu’aucun autre éleveur en Angleterre, soutient que la génération en dedans ne cause pas nécessairement la dégénérescence, mais que tout dépend de la manière de faire. « Mon système, dit-il, a été d’établir cinq ou six familles distinctes, d’élever chaque année environ trois cents poulets, de choisir dans chacune les meilleurs oiseaux pour les croisements, et de m’assurer ainsi un mélange de sang suffisant pour empêcher toute détérioration[3]. »

Tous les éleveurs sont donc unanimes à reconnaître que, pour les volailles maintenues dans un même endroit, la reproduction consanguine, poussée même à un degré qui serait sans conséquence pour la plupart des quadrupèdes, entraîne très-promptement des effets nuisibles. On admet d’autre part, d’une manière très-générale, que les poulets croisés sont les plus robustes et les plus faciles à élever[4]. M. Tegetmeier[5], très-compétent sur ce sujet, dit que les poules Dorkings laissées aux coqs Houdan ou Crève-cœur, produisent, au commencement du printemps, des poulets, qui, par leur taille, leur vigueur, leur précocité et leurs qualités pour le marché, l’emportent de beaucoup sur ceux des races pures. M. Hewitt dit,

    317. — Poultry Book, 1866, p. 135, quant au degré reconnu par les éleveurs de coqs de Combat, jusqu’auquel on peut pousser la consanguinité, par exemple, croiser occasionnellement une mère et un fils, mais en évitant la répétition d’unions de ce genre.

  1. Poultry Book, p. 79.
  2. Poultry Chronicle, 1854, vol. I, p. 43.
  3. Poultry Book, p. 79.
  4. Poultry Chronicle, vol. I, p. 89.
  5. Poultry Book, 1866, p. 210.