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Page:Darwin - De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication, tome 2, 1868.djvu/209

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HYBRIDITÉ.

influence, doivent probablement être de la même manière excessivement sensibles à l’action d’un croisement peu naturel. Les productions domestiques, d’autre part, qui, comme le prouve le fait même de leur domestication, n’ont pas dû être dans l’origine très-sensibles à des changements dans leurs conditions d’existence, et résistent encore actuellement à des changements répétés de même nature, sans que leur fécondité en soit diminuée, ont dû produire des variétés moins sujettes à avoir leurs facultés reproductrices affectées par le croisement, surtout avec des variétés ayant une origine analogue à la leur.

Quelques naturalistes me paraissent avoir attaché trop d’importance aux différences de fécondité entre les variétés et les espèces croisées. Quelques espèces d’arbres voisines ne se laissent pas greffer les unes sur les autres ; toutes les variétés peuvent l’être. Quelques animaux voisins sont affectés très-différemment par un même poison, et jusqu’à tout récemment on ne connaissait encore aucun fait analogue chez des variétés, mais on a actuellement prouvé que l’immunité contre certains poisons est dans quelques cas en corrélation avec la coloration des poils. La durée de la gestation diffère généralement beaucoup chez les espèces distinctes, fait qui n’a que tout récemment été remarqué chez les variétés ; il en est de même pour la durée de la germination chez les plantes. Mais je ne sache pas qu’on ait, sous ce rapport, observé de différence chez les variétés. Il y a là diverses différences physiologiques, auxquelles on pourrait probablement en ajouter d’autres, entre les espèces d’un même genre, qui ne se remarquent pas, ou très-rarement du moins chez les variétés, et qui dépendent en tout ou en partie d’autres différences constitutionnelles ; de la même manière que la stérilité des espèces croisées dépend de différences portant sur le système sexuel. Pourquoi donc leur attribuer une plus grande importance qu’aux autres différences constitutionnelles, quelle que soit l’utilité indirecte qu’elles puissent avoir en contribuant à maintenir distincts les habitants d’une même localité ? On ne peut répondre d’une manière satisfaisante à cette question. Le fait que les variétés domestiques les plus distinctes sont, à de rares exceptions près, très-fertiles lorsqu’on les