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Page:Darwin - De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication, tome 2, 1868.djvu/93

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HÉRÉDITÉ.

deux côtés du corps sont transmissibles, bien que contraires à la loi de symétrie. Même des mutilations et des suites d’accidents sont souvent héréditaires, surtout lorsqu’elles sont accompagnées de maladie ; peut-être même ne le sont-elles que dans ce dernier cas. Les effets fâcheux résultant de conditions nuisibles, auxquelles l’ascendant a pu être exposé pendant longtemps, peuvent être transmis à ses produits ; il en est de même, comme nous le verrons par la suite, des effets de l’usage ou du défaut d’usage des organes et des dispositions mentales. Les habitudes périodiques sont également héréditaires, mais, à ce qu’il paraît, ne se transmettent qu’avec peu de force.

Nous sommes donc amenés à regarder l’hérédité comme la règle et le défaut d’hérédité comme l’exception. Elle nous paraît quelquefois très-capricieuse dans ses manifestations, car elle transmet les caractères tantôt avec une très-grande force, tantôt avec une faiblesse inexplicable. Une même particularité, telle que le facies pleureur d’un arbre, les plumes soyeuses d’un oiseau, etc., peut se transmettre fortement ou pas du tout à différents membres d’un même groupe, et même à divers individus d’une même espèce, quoique traités de la même manière. Ces cas nous montrent que la puissance de transmission est une qualité purement individuelle. Il en est des légères différences qui distinguent les races ou sous-variétés comme des caractères isolés, car certaines races peuvent être propagées aussi sûrement que des espèces, tandis que d’autres n’offrent rien de certain. La même règle peut s’appliquer aux plantes qu’on propage par boutures, bulbes, etc., qui, à un certain point de vue, constituent des portions d’un même individu, car quelques variétés conservent et transmettent, à travers plusieurs générations successives de bourgeons, leurs caractères d’une manière beaucoup plus constante que d’autres.

Quelques caractères qui ne sont pas spéciaux à l’espèce souche primitive ont été certainement héréditaires depuis une époque fort ancienne, et peuvent par conséquent être considérés comme fermement fixés ; il est cependant douteux que la longueur de l’hérédité puisse en elle-même donner de la fixité aux caractères, bien que toutes les chances soient évidemment pour qu’une particularité qui aurait été longtemps transmise sans altération, continue à l’être tant que les condi-