Page:Darwin - La Descendance de l’homme, 1881.djvu/307

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

assure qu’il a souvent eu deux femelles ; en outre, la femelle est généralement plus faible et plus sujette à périr.

Pour les oiseaux à l’état de nature, M. Gould et d’autres savants[1] affirment que les mâles sont généralement plus nombreux que les femelles ; car, chez beaucoup d’espèces, les jeunes mâles ressemblant aux femelles, celles-ci paraissent naturellement être plus nombreuses. M. Baker, de Leadenhall, qui élève de grandes quantités de faisans provenant d’œufs pondus par des oiseaux sauvages, a informé M. Jenner Weir qu’il obtient généralement quatre ou cinq mâles pour une femelle. Un observateur expérimenté remarque[2] qu’en Scandinavie les couvées des coqs de bruyère (T. urogallus et T. tetrix) contiennent plus de mâles que de femelles ; il ajoute que, chez le dal-ripa (espèce de lagopus, ou ptarmigan), il y a plus de mâles que de femelles sur les emplacements où ces oiseaux se réunissent pour se faire la cour ; mais quelques observateurs expliquent cette circonstance par le fait que les carnassiers tuent plus de femelles. Il semble résulter clairement de divers faits signalés par White, de Selborne[3] que les perdrix mâles doivent se trouver en grand excès dans le sud de l’Angleterre ; on m’a assuré qu’il en est de même en Écosse. M. Weir tient de négociants, qui reçoivent à certaines saisons de grands envois de combattants (Machdes pugnax), que les mâles sont de beaucoup les plus nombreux. Le même naturaliste s’est adressé pour avoir quelques renseignements à des preneurs d’oiseaux vivants qui capturent annuellement un nombre étonnant de petites espèces pour le marché de Londres ; un de ces vieux chasseurs, digne de toute confiance, lui a affirmé que chez les pinsons les mâles sont en grand excès ; il pense qu’il y a deux mâles pour une femelle, ou qu’ils se trouvent au moins dans le rapport de 5 à 3[4]. Il ajoute que les mâles sont de beaucoup les plus nombreux chez les merles, soit qu’on les prenne au piège ou au filet. Ces données paraissent exactes, car le même homme a signalé une égalité approximative des sexes chez l’alouette, chez la linotte de montagne (Linaria montana) et chez le chardonneret ; il affirme, d’autre part, que, chez la linotte commune, les femelles sont extrêmement prépondérantes, mais inégalement, suivant les différentes années ; il s’est trouvé des époques où le rapport était de quatre femelles pour un mâle. Il faut cependant tenir compte de ce fait que la chasse aux oiseaux ne commençant qu’en septembre, quelques migrations partielles peuvent avoir eu lieu, et les troupes à cette période n’être composées que de femelles. M. Salvin, qui a porté son attention sur les sexes des oiseaux-mouches de l’Amérique, est convaincu de la prépondérance des mâles chez la plupart des espèces ; ainsi il s’est procuré, une année, 204 individus appartenant à dix espèces, et il a constaté qu’il y avait 166 mâles et 38 femelles. Chez deux autres espèces, les femelles étaient en excès, mais les proportions paraissent varier suivant les saisons et les

  1. Brehm, Illust. Thierleben, vol. IV, p. 990, en arrive à la même conclusion.
  2. Sur l’autorité de L. Lloyd, Game Birds of Sweden, 1867, pp. 13, 132.
  3. Nat. Hist. of Selborne, lett. xxix, édit. de 1825, vol. I, p. 139.
  4. M. Jenner Weir obtint des renseignements semblables à la suite de son enquête de l’année suivante. Pour montrer des pinsons attrapés, deux chasseurs avaient fait, en 1869, un pari à qui en prendrait le plus ; l’un des deux en prit en un jour, 62, et l’autre, 40 du sexe mâle. Le plus grand nombre qu’on ait prit en un jour fut 70.