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œsophage jaune et dénudé, de telle sorte que cette partie égale au moins en grosseur la moitié de son corps ; » dans cet état, il fait entendre divers cris profonds et discordants. Les plumes du cou redressées, les ailes abaissées, et traînant à terre sa longue queue étalée en éventail, il prend alors une foule d’attitudes grotesques. L’œsophage de la femelle n’offre rien de remarquable[1].

Il semble maintenant bien établi que la grande poche de la gorge chez l’outarde mâle d’Europe (Otis tarda), et chez au moins quatre autres espèces, ne sert pas, comme on le supposait autrefois, à contenir de l’eau, mais est en rapport avec l’émission, pendant la saison des amours, d’un cri particulier ressemblant à ock[2]. L’oiseau prend les attitudes les plus extraordinaires pendant qu’il articule ce cri. Un oiseau de l’Amérique méridionale (Cephalopterus ornatus, fig. 40) ressemblant à une corneille a reçu le nom d’oiseau parasol. Ce nom lui vient d’une immense touffe de plumes formées de tiges blanches nues surmontées de barbes d’un bleu foncé, qu’il peut redresser et transformer en une véritable ombrelle n’ayant pas moins de 15 centimètres de diamètre, qui recouvre la tête entière. Cet oiseau porte au cou un appendice long, mince, cylindrique, charnu, revêtu de plumes bleues écailleuses et serrées. Cet appendice sert probablement en partie d’ornement, mais aussi de véritable table d’harmonie ; car M. Bates a constaté, chez les oiseaux pourvus de cet appendice, « un développement inusité de la trachée et des organes vocaux. » En outre, cet appendice se dilate lorsque l’oiseau émet sa note flûtée, singulièrement profonde, puissante et longtemps soutenue. La crête céphalique et l’appendice du cou n’existent chez la femelle qu’à l’état de rudiments[3].

Les organes vocaux de certains palmipèdes et de certains échassiers sont fort compliqués, et diffèrent jusqu’à un certain point chez les mâles et les femelles. Dans quelques cas, la trachée, enroulée comme un cor de chasse, est profondément enfouie dans le sternum. Chez le cygne sauvage (Cycnus ferus) elle est plus profondément enfouie chez le mâle adulte, que chez la femelle ou chez le jeune mâle. Chez le Merganser mâle, la portion élargie de la tra-

  1. Richardson, Fauna Bor. Americ. ; Birds, 1831, p. 359. Audubon, o. c., vol. IV, p. 507.
  2. Ce sujet a récemment été traité dans les travaux suivants : — Prof. A. Newton, Ibis, 1862, p. 104 ; docteur Cullen, id., 1865, p. 145 ; M. Flower. Proc. of Zoolog. Soc., 1865, p. 747, et docteur Murie, Proc. Zool. Soc., 1868, p. 471. Dans ce dernier se trouve un excellent dessin de l’outarde australienne mâle au moment où elle étale ses charmes avec le sac distendu.
  3. Bates, The Naturalist on the Amazons, 1863, vol. II, p. 284. Wallace, Proc. Zool. Soc., 1856, p. 206. On a découvert récemment une espèce nouvelle portant au cou un appendice encore plus grand (C. penduliger) Ibis., vol. I, p. 457.