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les barbes des plumes colorées en blanc chez l’espèce parente affectent au contraire la couleur noire[1].


Formation et variabilité des ocelles ou taches oculiformes sur le plumage des oiseaux. — Les ocelles qui décorent les plumes de divers oiseaux, la fourrure de quelques mammifères, les écailles des reptiles et des poissons, la peau des amphibies, les ailes des lépidoptères et d’autres insectes constituent, sans contredit, le plus magnifique de tous les ornements ; ils méritent donc une mention spéciale. Un ocelle consiste en une tache placée au centre d’un anneau affectant une autre couleur, comme la pupille dans l’iris, mais le point central est souvent entouré de zones concentriques additionnelles. Chacun connaît, par exemple, les ocelles qui se trouvent sur les plumes de la queue du paon, ainsi que sur les ailes du papillon paon (Vanessa). M. Trimen a décrit une phalène de l’Afrique méridionale (Gynanisa Isis), voisine de notre grand paon, chez laquelle un ocelle magnifique occupe presque la totalité de la surface de chaque aile postérieure ; cet ocelle consiste en un centre noir, renfermant une tache en forme de croissant, demi-transparente, entourée de zones successivement jaune ocre, noire, jaune ocre, rose, blanche, rose, brune et blanchâtre. Nous ne connaissons pas les causes qui ont présidé à la formation et au développement de ces ornements si complexes et si magnifiques, mais nous pouvons affirmer, tout au moins, que chez les insectes, ces causes ont dû être très-simples ; car, ainsi que le fait remarquer M. Trimen, « il n’y a pas de caractère qui soit aussi instable chez les Lépidoptères que les ocelles, tant au point de vue du nombre que de la grandeur. M. Wallace, qui le premier a attiré mon attention sur ce point, m’a fait voir une série d’individus de notre papillon commun (Hipparchia Janira) présentant de nombreuses gradations, depuis un simple point noir jusqu’à un ocelle élégamment ombré. Chez un papillon de l’Afrique du Sud (Cylla Leda, Linn.) appartenant à la même famille, les ocelles sont encore plus variables. Chez quelques individus (A, fig. 53), la surface externe des ailes porte de larges taches noires dans lesquelles on observe çà et là des taches blanches irrégulières ; de cet état on peut établir une gradation complète conduisant à un ocelle assez parfait (A’), qui provient de la contraction des taches noires irrégulières. Chez d’autres individus on peut suivre une série graduée partant de petits points blancs entourés d’une ligne noire (B) à peine visible, et finissant par des

  1. Bechstein, Naturgesch. Deutschland’s, vol. IV, 1795, p. 31, sur une sous-variété du pigeon Monck.