Page:Darwin - La Descendance de l’homme, 1881.djvu/77

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périeures et inférieures. Meckel a, il y a longtemps, remarqué que lorsque les muscles du bras dévient de leur type propre, ils imitent presque toujours ceux de la jambe, et réciproquement pour les muscles de cette dernière. Les organes de la vue et de l’ouïe, les dents et les cheveux, la couleur de la peau et celle des cheveux, le teint et la constitution sont plus ou moins en corrélation les uns avec les autres[1]. Le professeur Schaaffhausen a le premier attiré l’attention sur les rapports qui paraissent exister entre une conformation musculaire très accusée et des arcades sus-orbitaires très saillantes, qui caractérisent les races humaines inférieures.

Outre les variations qu’on peut grouper avec plus ou moins de probabilité sous les titres précédents, il en reste un grand nombre qu’on peut provisoirement nommer spontanées, car notre ignorance est si grande qu’elles nous paraissent surgir sans cause apparente. On peut prouver, toutefois, que les variations de ce genre, qu’elles consistent, soit en légères différences individuelles, soit en déviations brusques et considérables de la conformation, dépendent beaucoup plus de la constitution de l’organisme que de la nature des conditions auxquelles il a été exposé[2].


Augmentation de la population. — On a vu des populations civilisées placées dans des conditions favorables, aux États-Unis par exemple, doubler leur nombre en vingt-cinq ans ; fait qui, d’après un calcul établi par Euler, pourrait se réaliser au bout d’un peu plus de douze ans[3]. À ce taux du doublement en vingt-cinq ans, la population actuelle des États-Unis, soit 30 millions, deviendrait, au bout de 657 années, assez nombreuse pour occuper tout le globe à raison de quatre hommes par mètre carré de superficie. La difficulté de trouver des subsistances et de vivre dans l’aisance constitue l’obstacle fondamental qui limite l’augmentation continue du nombre des hommes. L’exemple des États-Unis, où les subsistances se trouvent en grande quantité et où la place abonde, nous permet de conclure qu’il en est ainsi. La population de l’Angleterre serait promptement doublée si ces avantages venaient à y être doublés aussi. Chez les nations civilisées, le premier des deux obstacles agit surtout en restreignant les mariages. La mortalité considérable des enfants dans les classes pauvres, ainsi que celle produite à

  1. J’ai cité mes autorités pour ces assertions dans Variations des Animaux, etc., vol. II, pp. 442-360 (trad. française).
  2. Le sujet dans son entier a été discuté dans le chap. XXIII de la Variation des Animaux, etc.
  3. Lire l’ouvrage mémorable du rév. T. Malthus, Essay on the principle of population, 1826, vol. I, 6, 517.