Page:Darwin - Voyage d’un naturaliste autour du monde, trad. Barbier, 1875.djvu/432

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
416
ARCHIPEL DES GALAPAGOS.

planter notre tente, un endroit où ils n’eussent pas creusé leurs trous. Comme leurs cousins de l’espèce marine, ce sont des animaux fort laids ; le dessous de leur ventre est jaune orangé, leur dos rouge brunâtre ; leur angle facial, extrêmement petit, leur donne un aspect particulièrement stupide. Ils sont peut-être un peu moins grands que les individus de l’espèce marine ; cependant j’en ai trouvé plusieurs pesant de 10 à 15 livres. Leurs mouvements sont lents et ils semblent presque toujours plongés dans une demi-torpeur. Quand ils ne sont pas effrayés, ils rampent lentement, leur queue et leur ventre traînant sur le sol. Ils s’arrêtent souvent et semblent s’endormir pendant une minute ou deux, les yeux fermés et les pattes de derrière étendues sur le sol brûlant.

Ils habitent des terriers qu’ils creusent quelquefois entre des fragments de lave, mais le plus souvent sur les parties plates de tuf tendre qui ressemble au grès. Leurs terriers ne paraissent pas très-profonds ; ils pénètrent sous le sol en faisant un angle fort petit avec la surface, de telle sorte que, quand on marche sur un endroit habité par ces lézards, on enfonce constamment. Quand il creuse son terrier, cet animal travaille alternativement avec les côtés opposés de son corps. Une de ses pattes de devant gratte le sol pendant quelque temps, en rejetant la terre qu’il extrait vers sa patte de derrière qu’il a placée de façon à rejeter la terre hors du trou. Quand ce côté du corps est fatigué, les pattes situées de l’autre côté reprennent le travail, et ainsi de suite alternativement. J’en ai examiné un pendant longtemps, jusqu’à ce que la moitié de son corps ait disparu dans le trou ; je m’approchai alors de lui et le tirai par la queue. Il sembla fort étonné de ce procédé et sortit du trou pour voir ce qu’il y avait ; il me regarda alors bien en face comme s’il voulait me dire : Pourquoi diable me tirez-vous la queue ?

Ces animaux mangent pendant la journée et ne s’éloignent guère de leurs terriers ; s’ils sont effrayés, ils y courent de la façon la plus comique. Ils ne peuvent courir très-vite, sauf quand ils descendent un terrain en pente ; cela tient évidemment à la position latérale de leurs pattes. Ils ne sont pas craintifs ; quand ils regardent quelqu’un attentivement, ils relèvent leur queue, et, se soulevant sur leurs pattes de devant, ils agitent continuellement leur tête verticalement et essayent de se donner un air aussi méchant que possible. Mais au fond, ils ne sont pas méchants ; si on frappe du pied, leur queue s’abaisse immédiatement et ils s’éloignent