Page:Daudet - Aventures prodigieuses de Tartarin de Tarascon, 1872.djvu/211

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— « Qu’est-ce qu’ils me disaient donc qu’il n’y en avait plus ? » s’écria le Tarasconnais en faisant un saut en arrière… En entendant cette exclamation, le lion baissa la tête et, prenant dans sa gueule une sébile en bois posée devant lui sur le trottoir, il la tendit humblement du côté de Tartarin immobile de stupeur… Un Arabe qui passait jeta un gros sou dans la sébile ; le lion remua la queue… Alors Tartarin comprit tout. Il vit, ce que l’émotion l’avait d’abord empêché de voir, la foule attroupée autour du pauvre lion aveugle et apprivoisé, et les deux grands nègres armés de gourdins qui le promenaient à travers la ville comme un savoyard sa marmotte.

Le sang du Tarasconnais ne fit qu’un tour : — « Misérables, cria-t-il d’une voix de tonnerre, ravaler ainsi ces nobles bêtes ! » Et s’élançant sur le lion, il lui arracha l’im-