Page:Daudet - Jack, I.djvu/156

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Oh ! ne le dis pas, ne le dis pas ce que tu as à m’apprendre.

Mais elle continua, parlant à voix basse et très vite :

— Il faut que je parte pour un grand voyage… Je suis obligée de te quitter… mais je t’écrirai… Ne pleure pas surtout, mon chéri, tu me ferais trop de peine… D’abord ce n’est pas pour longtemps que je m’en vais… nous nous reverrons bientôt… oui, bientôt, je te le promets…

Et elle se mit à lui raconter une foule d’histoires saugrenues. Il s’agissait d’affaires d’argent, d’une succession à recueillir, de choses tout à fait mystérieuses.

Elle aurait pu parler longtemps encore, inventer mille autres histoires, Jack ne l’écoutait plus. Affaissé, anéanti, il pleurait silencieusement dans son coin, et le Paris qu’ils traversaient lui semblait bien changé depuis le matin, dépouillé de ses rayons printaniers, de ses parfums de lilas, lugubre, désastreux ; car il le regardait avec les yeux trempés de larmes d’un enfant qui vient de perdre sa mère.