Page:Daudet - Jack, I.djvu/167

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Moronval secoua la tête et s’en alla tout de suite faire sa déclaration au commissaire du quartier.

C’était une mauvaise affaire qui lui arrivait là. Il fallait à tout prix retrouver l’enfant, l’empêcher d’arriver jusqu’à Marseille. Le mulâtre avait peur des observations de « moucié Bonfils. » Puis le monde est si méchant. Le petit roi pouvait se plaindre des mauvais traitements qu’on lui avait fait subir, discréditer le pensionnat. Aussi, dans sa déposition chez le commissaire de police, eut-il bien soin de spécifier que Mâdou avait emporté une très grosse somme. Après quoi, il ajouta d’un air désintéressé que la question d’argent le préoccupait fort peu, et qu’il songeait surtout à tous les dangers que courait ce malheureux enfant, ce pauvre petit roi déchu, exilé, sans trône, sans patrie.

Le tigre épongeait ses yeux en parlant. Les policiers le consolaient :

— Nous le retrouverons, M. Moronval, soyez sans inquiétude.

Mais M. Moronval était très inquiet, au contraire, et tellement agité, qu’au lieu d’attendre chez lui bien tranquillement le résultat des recherches, comme le lui conseillait le commissaire, il se mit sur-le-champ en campagne, escorté de tous « ses pays chauds, » parmi lesquels notre ami Jack, pour seconder les efforts de la police.

Ce furent des excursions lointaines et variées à toutes les portes de Paris. Le mulâtre interrogeait les doua-