Page:Daudet - Jack, I.djvu/176

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Le petit roi n’en dit pas davantage ce soir-là, tellement il était exténué, et son voisin de lit dut s’endormir sans en savoir plus long.

Au milieu de la nuit, Jack fut réveillé en sursaut. Mâdou riait, chantait, parlait tout seul avec une volubilité extraordinaire et dans la langue de son pays. Le délire commençait.

Au matin, le docteur Hirsch, que l’on avait fait venir en toute hâte, déclara que Mâdou était très malade.

« Une bonne petite méningo-encéphalite », disait-il en frottant les unes contre les autres ses phalanges jaunes et luisantes comme un jeu d’osselets. Ses lunettes étincelaient. Il avait l’air ravi.

Un homme terrible, ce docteur Hirsch. La tête farcie de lectures scientifiques, de toutes les utopies, de toutes les théories, trop paresseux et décousu dans ses idées pour un travail suivi, il avait pris à peine une ou deux inscriptions médicales, recouvrant son ignorance réelle d’un fatras d’études compliquées sur les médecines indienne, chinoise, chaldéenne. Même il s’occupait de magie, et quand une vie humaine tombait par hasard en son pouvoir, il songeait aux mystères de l’envoûtement, aux recettes ténébreuses et dangereuses des sorcières.

Madame Moronval était d’avis d’appeler un vrai médecin à l’aide de cette science en délire, mais le directeur, moins compatissant et ne se souciant pas de