Page:Daudet - Jack, I.djvu/277

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quand ils ne sont pas gênés du blâme ni de la raillerie des gens sérieux.

— Il faut la distraire, disait M. Rivals à sa femme… Il y a le petit d’Argenton qui est charmant, à peu près de son âge et qui ne bavarderait pas, lui.

— Oui, mais qu’est-ce que c’est que ces gens-là ? D’où viennent-ils ? Personne ne les connaît…, répondait madame Rivals toujours méfiante.

— La crème des gens, ma chère amie. Le mari est très original, c’est vrai, mais tu comprends, les artistes… La femme est un peu bêtasse, mais si bonne femme. Quant à l’honnêteté, par exemple, j’en réponds.

Madame Rivals remuait la tête. Elle n’avait pas confiance dans la perspicacité de son mari.

— Oh ! tu sais, toi…

Et elle soupirait, avec un regard plein de reproches.

Le vieux Rivals baissait le front comme un coupable. Pourtant il tenait à son idée :

— Prends garde, disait-il, la petite s’ennuie. Elle finira par tomber malade. Et puis quoi ? Ce petit Jack est un enfant, Cécile aussi. Qu’est-ce que tu veux qu’il arrive ?

Enfin la grand’mère sa laissa décider, et Jack devint le compagnon de Cécile.

Ce fut pour lui une vie nouvelle. Il vint rarement d’abord, puis un peu plus, ensuite tous les jours. Madame Rivals prit bien vite en affection cette jolie