Page:Daudet - Jack, I.djvu/60

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— Prends donc… ne te gêne pas… J’en ai une pleine malle… disait l’intéressant jeune homme en fermant les yeux pour pouvoir parler.

Jack, souriant à travers ses larmes, faisait signe que non, qu’il ne voulait pas de ces excellents bouts de cigare, et l’élève Saïd, dont l’éloquence était très limitée, restait planté devant lui, ne sachant plus que dire, quand M. Moronval rentra.

Il était allé reconduire mademoiselle Constant jusqu’à la voiture et revenait animé d’une respectueuse indulgence pour le chagrin de son nouveau pensionnaire.

Le cocher Augustin avait de si belles fourrures, le cheval du coupé paraissait si fringant, que le petit de Barancy bénéficia de l’apparence superbe de son équipage. C’était fort heureux pour lui, M. Moronval ayant d’ordinaire recours, pour calmer les nostalgies de ses « pays chauds », à une méthode sifflante, cinglante, coupante, et pas du tout Decostère.

— C’est cela, dit-il à l’Égyptien, tâchez de le distraire… Jouez ensemble à de petits jeux… mais d’abord, rentrez dans la salle, où il fait plus chaud qu’ici… Je donne congé jusqu’à demain pour la bienvenue du nouveau.

Pauvre nouveau !

Dans la grande rotonde vitrée, où une dizaine de métis jouaient aux barres en hurlant, il fut tout de suite entouré, questionné dans des jargons incompréhensibles. Avec ses boucles blondes, son plaid, ses