Page:Daudet - L’Immortel (Lemerre 1890).djvu/333

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tion : « Ne fais pas cela, Paul… pour le nom que tu portes, ne fais pas cela, mon enfant ; je t’en prie ! » Il l’empoignait par l’épaule, le secouait d’un geste attendri, à la vibration de ses paroles. Mais le jeune homme se dégageait, n’aimant pas ces démonstrations, se défendait de phrases vagues : « Je ne trouve pas… ce n’est pas mon sentiment… » Et devant la fermeture de ce visage au fuyant regard, ce fils qu’il sentait si loin de lui, le père, instinctivement, élevait la voix, invoquant son droit de chef de famille. Un sourire qu’il surprit entre Paul et sa mère, preuve nouvelle de leur connivence en cette ignominie, acheva de l’exaspérer. Il tonna, délira, menaçant de protester publiquement, d’écrire aux journaux, de les flétrir tous deux, la mère et le fils, dans son histoire. C’était sa menace terrible entre toutes ! Quand il disait d’un personnage du passé : « Je l’ai flétri dans mon histoâre… » nul châtiment ne lui semblait comparable. Pourtant, les deux alliés ne s’en émouvaient guère. Mme Astier, faite à cette menace de flétrissure presque autant qu’au charriement de la malle par les couloirs, se contenta de dire en boutonnant ses gants : « Vous savez qu’on entend tout d’à côté. » Malgré la porte et les tentures, la rumeur d’une causerie se distinguait, venue du salon.

Alors, comprimant et râlant sa colère : « Écoute-