Page:Daudet - Le Petit Chose, 1868.djvu/161

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

XIV
l’oncle baptiste

… Un singulier type d’homme que cet oncle Baptiste, le frère de madame Eyssette. Ni bon, ni méchant, marié de bonne heure à un grand gendarme de femme avare et maigre qui lui faisait peur, ce vieil enfant n’avait qu’une passion au monde : la passion du coloriage. Depuis quelque quarante ans, il vivait entouré de godets, de pinceaux, de couleurs, et passait son temps à colorier des images de journaux illustrés. La maison était pleine de vieilles illustrations, de vieux Charivaris de vieux Magasins pittoresques de cartes géographiques, tout cela fortement enluminé. Même dans ses jours de disette, quand la tante lui refusait de l’argent pour acheter des journaux à images, il arrivait à mon oncle de colorier des livres. Ceci est historique : j’ai tenu dans mes mains, une grammaire espagnole que mon oncle avait mise en couleurs d’un bout à l’autre, les adjectifs en bleu, les substantifs en rose, etc…