Page:Daudet - Sapho, 1884.djvu/122

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— Comment ! cette servante que j’ai vue chez toi…

— C’était ma belle-mère… Elle avait été si bonne pour moi quand j’étais petite ; je la prenais pour l’arracher à son gueux de mari qui, après lui avoir mangé tout son bien, la rouait de coups, l’obligeait à servir une gaupe avec laquelle il vivait… Ah ! la pauvre Machaume, elle sait ce que coûte un bel homme. Eh bien ! quand elle m’a eu quittée, malgré tout ce que j’ai pu lui dire, elle est courue se remettre avec lui et, maintenant, la voilà à l’hospice. Comme il se laisse aller sans elle, le vieux gredin ! était-il sale ! quelle mine de rouleur ! il n’y a que son fouet… as-tu vu comme il le tenait droit ?… Même saoul à tomber, il le porte devant lui comme un cierge, le serre dans sa chambre ; il n’a jamais eu que ça de propre… Bon fouet, bonne mèche, c’est son mot.

Elle en parlait inconsciemment, ainsi que d’un étranger, sans dégoût ni honte ; et Jean s’épouvantait à l’entendre. Ce père !… cette mère !… en face de la figure sévère du consul et de l’angélique sourire de Mme Gaussin !…