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TROISIÈME TABLEAU

LA CUISINE DE CASTELET
À droite, dans l’encoignure, haute cheminée à grand manteau. — À gauche, longue table et banc de chêne, bahuts, portes intérieures. — C’est le petit jour.

Scène PREMIÈRE

LE PATRON MARC, L’ÉQUIPAGE.
Le patron Marc, sur une chaise, sue a grosses gouttes pour entrer dans ses grandes hottes de marais. — L’équipage, tout harnaché, est adossé contre la table et dort debout.


marc.

Vois-tu, matelot, en Camargue, il n’y a de bon que l’affût du matin. (Tirant sur sa botte.) Hé ! allez donc !… Le jour, il faut courir dans la vase, lever les jambes comme un cheval borgne. Pour tuer quoi ? pas même une sarcelle… ho ! hisse ! me voilà botté… À l’aube, au contraire, les oies, les flamants, les charlottines, tout ça vous défile en bataillons sur la tête, on n’a qu’à tirer dans le tas. Pan ! pan !… Ça vaut la peine, hein ?… Qu’est-ce que tu dis ? Hé ! là-bas. Hé ! Est-ce que tu dors, matelot ?