Page:Daveluy - L'esclave des Agniers, 1933.djvu/14

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représente-toi nos alarmes, notre émoi, lorsque d’une chaloupe descendit soudain, la figure sombre et tirée, le fils d’Ignace Otoûolti. Il arrivait des Iroquois. Il monta tout de suite au Fort et là le Commandement de La Poterie et nous tous apprirent les plus sanglantes, les plus douloureuses nouvelles. Le Père Jogues était mort, Lalande aussi. « Mais toi, toi, au moins, » criai-je ! « Toi, nous narra-t-il, tu vivais, mais tu n’avais dû le salut qu’à Kinaetenon. Il avait exigé publiquement de tous, qu’on te laissât continuer auprès de lui ta situation torturante d’esclave ». Oh ! Charlot, Charlot, vois-tu, de te savoir vivant encore, bien que malade, bien que bassement humilié, me causa une telle émotion que je m’évanouis.

Juge de mon bonheur en voyant arriver Feu peu de temps après.

Tiens, une inquiétude me prend en ce moment. Sauras-tu percer le secret de la cachette où j’enfouis cette longue lettre ? Le Huron qui doit conduire ton chien à Kinaetenon le sait, mais aura-t-il tout le courage voulu, toute l’intelligence surtout d’une situation dangereuse, pour arriver jusqu’à ton maître. Et si on le tuait avant ? Et Feu aussi ? Non, non, je ne veux pas douter ainsi de la