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Page:Daveluy - Une Révolte au pays des fées, 1936.djvu/67

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les sorciers de l’île d’orléans

— Sancho, remarqua Poucette en riant, vous n’aimez guère le sexe faible, je vois cela.

— Faible, faible ! Peuh !… Ça dépend du point de vue.

Don Quichotte semblait indécis. Le beau regard souriant que posait sur lui Petite Poucette l’engageait à se hâter, à faire ce que voulait cette enfant. Mais à cet instant, une voix grêle l’interpella de la rive, une voix moqueuse, harcelante, des plus irritantes.

« Ah ! ah ! ah ! disait la voix au loin, le beau paladin que voici ! Pourquoi ne pas l’inviter à notre sabbat ? Ce sera avec lui, ses compagnons et toutes ces montures efflanquées, un numéro magnifique à notre programme, un numéro de haut goût. Hourrah ! je vote pour une danse exécutée par ce long et squelettique hidalgo !… Ah ! ah ! ah ! que tout cela est ridicule ! Que nous allons nous en amuser ! »

Alors, Don Quichotte vit rouge. Il n’entendit plus rien. Éperonnant Rossinante, hurlant et vociférant à Sancho de le suivre, il bondit et atteignit bientôt le bord du fleuve. Il y trouva, comme par enchantement, barque et passeur. La traversée se fit avec une rapidité vertigineuse. En touchant à terre, Don Quichotte et ses compagnons se sentirent éblouis. Alors, en une seconde, des lutins et des cyclopes, en nombre incroyable, les entourèrent, les enchaînèrent, puis les entraînèrent au fond de l’île.

Les Sorciers de l’île d’Orléans accueillaient toujours ainsi, les hôtes imprudents qui leur survenaient vers l’heure de minuit.