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les patriotes

dans ces noirs cachots où les rayons du soleil sont inconnus aux pauvres victimes de la tyrannie anglaise. Il n’est pas nécessaire de parler ni d’écrire, pour faire comprendre l’état le plus misérable auquel la nature humaine puisse être réduit. Vous dirai-je tout le respect que j’ai pour vous, quand vous en avez eu tant de preuves ? Cependant ce serait honteux de ma part de ne pas me rendre à vos désirs. Permettez-moi alors, madame, de vous demander une faveur, c’est de garder une place pour moi dans vos pensées, après que l’heure terrible du sacrifice sera passée. Quand je serai parti, vous vivrez encore. Dans quatre heures, je mourrai sur l’échafaud érigé par les ennemis de notre chère patrie. Oh ! quels mots enchanteurs je viens de prononcer ! — « Ma patrie ! » Ô ma patrie ! à toi j’offre mon sang comme le plus grand et le dernier des sacrifices que je puisse faire pour te délivrer du joug odieux de tes traîtres ennemis. Puisse le Tout Puissant agréer mon sanglant sacrifice ! Vous verrez des jours meilleurs. Cette conviction intime et l’espoir que vous, madame, votre mari et tous mes amis, penserez quelquefois à moi, quand je ne serai plus, seront pour moi une source de consolation et de force dans les dernières tortures de l’agonie. La grande cause pour laquelle je suis à la veille de souffrir, triomphera.

« Adieu, madame ! Soyez heureuse ainsi que votre mari, vous le méritez tous deux. C’est le vœu d’un homme qui dans quelques heures aura sacrifié sa vie au salut de sa malheureuse patrie et à la liberté qu’il préfère à la vie. Je vous dis encore une fois adieu, madame.

« Votre malheureux mais sincère ami,
« Chevalier de Lorimier. »


De Lorimier avait eu pour compagnon de cellule, dans les premiers temps de son emprisonnement, le Dr