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MÉMOIRES SECRETS

Société, etc. » Les Jésuites redoutèrent une pareille proposition. Le Père Girard était un saint qui n’avait pas besoin d’apologie : le ciel, s’il le voulait, ferait des miracles pour le justifier… L’entêtement fut si grand de la part des révérends Pères, que l’abbé, piqué vivement, répliqua : « Eh bien ! mes Pères, vous ne voulez pas de moi pour défenseur : je vous déclare la guerre, et vous verrez quel ennemi je puis être ; mais je n’en demeurerai pas moins disposé à faire la paix, car je veux être de vos amis, à quelque prix que ce soit : » et il a réussi.

12. — M. de Marivaux, de l’Académie Française, est mort aujourd’hui. Les deux Théâtres sont enrichis de ses productions, et plusieurs de ses romans ingénieux sont entre les mains de tout le monde. Il avait l’esprit fin et maniéré, beaucoup de délicatesse ; il était parvenu à sa soixante-dix-septième année et ne faisait plus rien.

13. — Les deux spectacles de la Fausse Gloire et de la Gloire Véritable, dont on voit la description dans le discours de l’abbé de Voisenon, ont donné l’idée d’une exécution pittoresque pour les fêtes qu’on doit donner à l’occasion de la paix. D’abord s’élèvera celui de la Fausse Gloire, avec son inscription et tous les attributs des conquérans. Il subsistera peu, et s’écroulera bientôt pour faire place au second, qui durera toute la nuit.

Comme M. l’abbé de Voisenon se nomme Fusée, et qu’on pourrait trouver quelques allusions piquantes à son genre d’esprit, sa famille s’est d’abord opposée à ce projet. Tout considéré, on estime qu’il lui ferait beaucoup d’honneur, et lui-même en est comblé.

15. — M. d’Alembert s’est décidément réfusé aux instances de l’impératrice des Russies. Bien des gens croient