Page:De Banville - Les Stalactites.djvu/124

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Son arc est d’un bois lisse et dur,
Et ses flèches bien aiguisées,
Cachant leurs pointes d’acier pur
Sous la dorure déguisées,
Sonnent dans le carquois d’azur.

Quand sa tresse inonde son cou,
(Bien que cette amante farouche
Vous plante là pour un bijou,)
Pour les morsures de sa bouche
On se résigne à mourir fou.

Cette chasseresse d’Amours
Dont il faut, même au prix d’un crime,
Idolâtrer les fiers atours
Et les belles mains, c’est la Rime,
Délice et tourment de nos jours.

Quel bonheur, d’orner ses appas
De joyaux ! Au bois qu’avril dore,
Quel bonheur de baiser ses pas !
Quand on l’a connue, on l’adore
Pour jamais, et jusqu’au trépas.

Oh ! pour moi, rien n’éclipsera
Sa lèvre indignée et rieuse !
Sa voix seule me bercera
Et mon sang tout entier sera
Bu par cette victorieuse.