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Page:De Coster - Contes brabançons, 1861.djvu/142

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— Encore un mot, poursuivit-il : Louise, je t’ai parlé franchement, sévèrement, comme il convient à un futur mari ; Louise, veux-tu être ma femme ?

— Sa femme ! il l’a dit ! s’écria-t-elle.

Puis, sans doute effrayée d’avoir parlé trop haut, elle se leva et alla écouter dans le vestibule. Christus entendit malgré le tonnerre et le bruit des vitres fouettées par la grêle, le ronflement sonore des trois Godin.

— Ils dorment, dit Louise en rentrant et en fermant la porte.

Elle se rassit et dit :

— Maintenant, Christus, je vais vous répondre. Écoutez-moi bien, je vous jure que je ne parlerais pas autrement à l’heure de ma mort que je ne vais le faire maintenant : Depuis longtemps je vous aime ; peut-être aurais-je pu en aimer un autre, mais cet autre n’est pas venu, c’est donc vous le premier et le dernier à qui j’aurai donné mon cœur. Christus, il n’y a ni Dieu ni démon qui ont fait que ce qui s’est passé entre nous se soit passé ; la faute en est à vous d’abord, à moi ensuite. Vous auriez dû comprendre ce que c’est qu’une fille de vingt-huit ans qui n’a point d’amoureux, n’aura point de mari ni d’enfants et n’a pour toute perspective que d’être seule dans la vie comme une parricide. Vous deviez avoir assez de cœur pour être