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Page:De Coster - Contes brabançons, 1861.djvu/85

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La vente des bijoux produisit vingt-trois mille francs, auxquels Isaac eut le honteux courage de joindre les cinq mille florins de la dot d’Anna.


XXX.


Ottevaere à Anna.

Chère aimée, martyre volontaire, quelle vie mènes-tu ? Sais-tu bien qu’on en meurt ou qu’on en devient folle ? Regarde, il neigera aujourd’hui ; le temps est gris et l’on dit qu’il fait froid. Si nous étions à nous deux ? Nous vois-tu ? Tiens, nous sortons ensemble, toi à mon bras, quel rêve ! Comme deux enfants, nous rions, nous marchons vite, serrés l’un contre l’autre. Nous traversons vingt rues au grand pas de notre jeunesse ; devant nous s’ouvrent la campagne et les libres horizons. Le ciel est gris, couvert et morne ; que nous importe ; il est en nous un soleil, notre amour, qui éclaire toute cette tristesse. Nous marchons, nous parlons, quelle joie ! quelle chanson divine ! la force et la beauté. Comme cette campagne est vaste : un baiser ! Non, je me trompe, je rêve, je suis fou.