Page:De Merejkowsky - Le Roman de Léonard de Vinci, 1907.djvu/102

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calvitie, et elle a encore remercié Dieu du bienfait de ce traitement.

Puis, se penchant à l’oreille de la duchesse, elle commença à lui narrer la dernière nouvelle de la ville, comme quoi la jeune femme du principal consul de la gabelle, la ravissante madonna Filiberta, trompait son mari et s’amusait avec un chevalier espagnol de passage.

— Ah ! vieille entremetteuse ! dit en riant Béatrice, visiblement intéressée par le récit. C’est toi qui as enjôlé la malheureuse…

— Permettez, Votre Seigneurie, elle n’est pas malheureuse ! Elle chante comme un oiselet, se réjouit et me remercie chaque jour. En vérité, me dit-elle, ce n’est que maintenant que j’ai constaté la différence qu’il y a entre les baisers d’un mari et ceux d’un amant.

— Et le péché ? Sa conscience ne la tourmente pas ?

— Sa conscience ? Voyez-vous, Votre Seigneurie, bien que les moines et les prêtres affirment le contraire, je pense que le péché d’amour est le plus naturel des péchés. Quelques gouttes d’eau bénite suffisent pour vous en laver. De plus, en trompant son mari elle lui rend en gâteau ce qu’il lui donne en pain, et de la sorte, si elle n’efface pas complètement, du moins elle atténue son péché devant Dieu.

— Le mari la trompe donc aussi ?

— Je ne puis l’affirmer. Mais ils sont tous semblables, car je suppose qu’il n’y a pas au monde un mari qui n’aimerait n’avoir qu’un bras, plutôt qu’une seule femme.