Page:De Merejkowsky - Le Roman de Léonard de Vinci, 1907.djvu/11

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de bouc armées de sabots. Et une drôle de gueule, comme s’il riait en dansant sur une jambe et en claquant des doigts. Il était devenu vert de vieillesse.

— Qu’en a-t-on fait ?

— Une cloche pour la nouvelle chapelle de Saint-Michel.

Messer Cipriano eut un geste de colère.

— Pourquoi ne me l’as-tu pas dit plus tôt, Grillo ?

— Vous étiez à Sienne pour affaires.

— Tu aurais dû m’écrire. J’aurais envoyé quelqu’un. Je serais venu moi-même, je n’aurais regretté aucune somme d’argent… Je leur aurais donné dix cloches, à ces imbéciles !… Une cloche ! Fondre pour une cloche un faune dansant… Peut-être une œuvre du maître grec Scopas !

— Ne vous fâchez pas si fort, messer Cipriano. Ces imbéciles sont déjà punis. Depuis deux ans que la cloche est pendue, les vers rongent les pommes et les cerises, et les récoltes d’olives sont médiocres. Et le son de la cloche est mauvais.

— Pourquoi ?

— Comment vous dire ? elle n’a pas un son pur ; elle ne réjouit pas les cœurs chrétiens ; elle bavarde sans suite. Comment voulez-vous qu’on puisse fondre une cloche d’un diable ! Sans vous fâcher, messer, le curé a peut-être raison : toutes ces saletés que l’on déterre ne nous apportent rien de bon. Il faut conduire l’affaire avec circonspection. Se préserver par la prière, car le diable est fort et malin ; il entre par une oreille et sort par l’autre. L’impur nous a assez