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l’enlèvement

d’autres de poisson, les dernières de bouillie de maïs.

Selon l’usage, l’amphytrion s’abstenait de manger, mais hélas ! déjà les traiteurs avaient porté chez ces peuples indomptés le mal de l’alcool, et Le Soir aimait l’eau de feu. Il ne refusait donc pas de boire avec ses invités. La dangereuse boisson coula si généreusement, qu’au bout de quelques heures la plupart des sauvages étaient ivres.

Fatigués de ces réjouissances grossières qu’ils subissaient depuis le matin, les deux Européens s’étaient retirés un peu à l’écart, avides de détourner leurs yeux du spectacle attristant de cette dégradation.

« Sortons, dit Philippe à Paul ».

« Bonne idée de changer le tableau : allons voir les pièges que nous avons tendus aux lièvres ».

« Oui, car ces ivrognes ne sont nullement intéressants à cette heure ; et pour ma part, je les ai regardés assez longtemps. Heureusement l’hiver est fini ; dans quelques jours, nous rejoindrons nos compatriotes. »

« Dans quelques jours peut-être, reprit Paul, car ces sauvages insouciants dérangent toutes nos prévisions et nous forcent à redouter toujours de nouveaux retards. Cette fois, il faudra compter avec l’eau de vie et… si la provision n’est pas épuisée, nous résigner à attendre. » Il