Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/154

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tient le livre ne se sent plus autant d’envie de s’apitoyer. Cette forme pleureuse est précisément l’antipode de la méthode française qui veut de la concision et de la sobriété. D’ailleurs l’institution des enfants trouvés, qui est attaquée outrageusement dans cet ouvrage, n’en demeure pas moins un établissement philanthropique, d’une utilité incontestable dans un pays où, s’il était supprimé, une foule de nouveau-nés périrait infailliblement.

Un rat, qui était venu manger les restes de notre souper fut la cause de ces critiques, auxquelles je n’aurais pas pensé s’il ne m’eût dérangé dans ma lecture.

Ginevra, parvenue à l’âge de quinze ans, finit par aimer et par être séduite. Elle tente de se noyer ; on la sauve et, après bien des aventures, un beau jour, son lâche amant veut la tuer pour se débarrasser d’elle. Que va-t-il arriver, grand Dieu !

Un gémissement douloureux répondit à cette exclamation. Mon voisin sauta hors du lit ; une bête venimeuse l’avait mordu au front. Après examen, il fut décidé entre nous que ce devait être un mille-pieds ou une araignée. L’Anglais, dans une pose dramatique, faisait la grimace et montrait, avec emphase, des insectes énormes qui couraient sur les murs :

— Je vous le disais bien, monsieur le français, qu’il fallait rester à Catane…

Mais tirons un voile sur les calamités de la Sicile et fermons le livre de Ginevra. Les mauvais jours ne sont rien, en voyage, auprès des mauvaises nuits. La scène se termina par un serment solennel de ne jamais coucher ailleurs que dans les grandes villes, serment qu’on oublie aussitôt que le jour paraît.