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flotter, s’écriait ainsi : « Mon âme n’aura jamais repos qu’elle ne se soit abîmée dedans la mer de la Divinité qui est son origine » ; et sainte Françoise, considérant un agréable ruisseau sur le rivage duquel elle s’était agenouillée pour prier, fut ravie en extase, répétant plusieurs fois ces paroles tout bellement : « La grâce de mon Dieu coule ainsi doucement et souèvement comme ce petit ruisseau ». Un autre voyant les arbres fleuris soupirait : « Pourquoi suis-je seul défleuri au jardin de l’Église ? » Un autre voyant des petits poussins ramassés sous leur mère : « O Seigneur, dit-il, conservez-nous sous l’ombre de vos ailes ». L’autre, voyant le tourne-soleil, dit : « Quand sera-ce, mon Dieu, que mon âme suivra les attraits de votre bonté ? » Et voyant des pensées de jardin, belles à la vue mais sans odeur : « Eh ! dit-il, telles sont mes cogitations, belles à dire, mais sans effet ni production ».

Voilà, ma Philothée, comme l’on tire les bonnes pensées et saintes aspirations de ce qui se présente en variété de cette vie mortelle. Malheureux sont ceux qui détournent les créatures de leur Créateur pour les contourner au péché ; bienheureux sont ceux qui contournent les créatures à la gloire de leur Créateur, et emploient leur vanité à l’honneur de la vérité. « Certes dit saint Grégoire Nazianzène, j’ai accoutumé de rapporter toutes choses à mon profit spirituel ». Lisez la dévote épitaphe que saint Jérôme a faite de sa sainte Paule car c’est belle chose à voir comme elle est toute parsemée des aspirations et conceptions sacrées qu’elle faisait en toutes sortes de rencontres.

Or, cet exercice de la retraite spirituelle et de