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CHAPITRE XIV

DE LA PAUVRETÉ D’ESPRIT OBSERVÉE
ENTRE LES RICHESSES


« Bienheureux sont les pauvres d’esprit, car le royaume des deux est à eux ; malheureux donc sont les riches d’esprit, car la misère d’enfer est pour eux. Celui lest riche d’esprit lequel a ses richesses dedans son esprit, ou son esprit dedans les richesses ; celui est pauvre d’esprit qui n’a nulles richesses dans son esprit, ni son esprit dedans les richesses. Les alcyons font leurs nids comme une paume[1], et ne laissent en iceux qu’une petite ouverture du côté d’en haut ; ils les mettent sur le bord de la mer, et au demeurant les font si fermes et impénétrables que les ondes les surprenant, jamais l’eau n’y peut entrer ; ains tenant toujours le dessus, ils demeurent emmi la mer, sur la mer et maîtres de la mer. Votre cœur, chère Philothée, doit être comme cela, ouvert seulement au ciel, et impénétrable aux richesses et choses caduques : si vous en avez, tenez votre cœur exempt de leurs affections ; qu’il tienne toujours le dessus et qu’emmi les richesses il soit sans richesses et maître des richesses. Non, ne mettez pas cet esprit cé-

  1. « Dans quelques provinces, on appelle paume la pelote ou balle avec laquelle on joue », (Littré).