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ble, car encore qu’ils aient le cœur contourné à l’amour, si ne veulent-ils pourtant pas en prendre qu’avec quelque avantage de gloire.

Ces amitiés sont toutes mauvaises, folles et vaines : mauvaises, d’autant qu’elles aboutissent et se terminent enfin au péché de la chair, et qu’elles dérobent l’amour et par conséquent le cœur à Dieu, à la femme et au mari, à qui il était dû ; folles, parce qu’elles n’ont ni fondement ni raison ; vaines, parce qu’elles ne rendent aucun profit, ni honneur, ni contentement. Au contraire elles perdent le temps, embarrassent l’honneur, sans donner aucun plaisir que celui d’un empressement de prétendre et espérer, sans savoir ce qu’on veut ni qu’on prétend. Car il est toujours avis à ces chétifs et faibles esprits qu’il y a je ne sais quoi à désirer ès témoignages qu’on leur rend de l’amour réciproque, et ne sauraient dire que c’est[1] ; dont leur désir ne peut finir, mais va toujours pressant leur cœur de perpétuelles défiances, jalousies et inquiétudes.

Saint Grégoire Nazianzène, écrivant contre les femmes vaines, dit merveilles sur ce sujet ; en voici une petite pièce qu’il adresse voirement aux femmes, mais bonne encore pour les hommes : « Ta naturelle beauté suffit pour ton mari ; que si elle est pour plusieurs hommes, comme un filet tendu pour une troupe d’oiseaux, qu’en arrivera-t-il ? Celui-là te plaira qui se plaira en ta beauté, tu rendras œillade pour œillade, regard pour regard ; soudain suivront les souris et petits mots d’amour,

  1. Ce que c’est.