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nues injures, ces petites incommodités, ces pertes de peu d’importance qui vous sont journalières ; car par le moyen de ces petites occasions, employées avec amour et dilection, vous gagnerez entièrement son cœur et le prendrez tout vôtre. Ces petites charités quotidiennes, ce mal de tête, ce mal de dents, cette défluxion[1], cette bizarrerie du mari ou de la femme, ce cassement d’un verre, ce mépris ou cette moue, cette perte de gants, d’une bague, d’un mouchoir, cette petite incommodité que l’on se fait, d’aller coucher de bonne heure et de se lever matin pour prier, pour se communier, cette petite honte que l’on a de faire certaines actions de dévotion publiquement : bref, toutes ces petites souffrances, étant prises et embrassées avec amour, contentent extrêmement la Bonté divine, laquelle pour un seul verre d’eau a promis la mer de toute félicité à ses fidèles ; et parce que ces occasions se présentent à tout moment, c’est un grand moyen pour assembler beaucoup de richesses spirituelles que de les bien employer.

Quand j’ai vu en la vie de sainte Catherine de Sienne tant de ravissements et d’élévations d’esprit, tant de paroles de sapience, et même des prédications faites par elle, je n’ai point douté qu’avec cet œil de contemplation elle n’eût ravi le cœur de son Époux céleste ; mais j’ai été également consolé, quand je l’ai vue en la cuisine de son père tourner humblement la broche, attiser le feu, apprêter la viande, pétrir le pain et faire tous les plus bas offices de la maison, avec un courage plein d’amour

  1. Fluxion.