Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/237

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Mon cœur n’ayma plus rien que la haute science :
Mon cœur n’ayma plus rien que ce divin objet,
Dont tout sceptre despend, dont tout prince est sujet.
Aussi pour vaquer mieux à la paisible estude,
Je vins me confiner dans cette solitude :
Et gouster le repos d’un si charmant sejour,
Lors que ce sage Grec abandonna la cour.
Trente fois le soleil a fourny sa carriere,
Et porté haut et bas sa feconde lumiere,
Depuis qu’en ce desert je me plais à resver,
Et je crois toutesfois que j’y viens d’arriver.
J’ay pour me divertir dans cette roche affreuse,
Une bibliotheque, et superbe, et nombreuse :
Venez la voir, seigneur, mes livres ont des voix ;
Et ces grands conseillers ne flattent point les rois.
A ces mots il s’osta de l’aspect du rivage :
Et menant ce heros dans sa grotte sauvage,
Il fut y faire voir au roy qui le suivoit,
Le grand et riche amas des livres qu’il avoit.
Voicy, dit-il, seigneur, ces conseillers fidelles,
De qui les sages roys ont tous pris leurs modelles :
Qui font utilement leur sçavoir esclater ;
Et qui francs d’interest leur parlent sans flater.
Voicy de tous les arts les maistres veritables,
Et de tous les mortels les amis charitables :
Que l’on fait comme on veut, ou taire, ou discourir,
Et que l’on voit tousjours prests à nous secourir.
Voicy tous les autheurs de l’utile grammaire,
Des arts et du sçavoir la porte necessaire :