Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/62

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par tes grands efforts,
Va renverser l’orgueil des vivants et des morts.
Obeïs promptement, à Dieu qui te l’ordonne :
Et de sa propre main attends une couronne :
Mais riche, mais superbe, et pour tout dire enfin,
Digne de tes exploits, et de ton grand destin. »
L’immortel messager avec ces mots acheve :
Le roy baisse les yeux, et puis il les releve :
Et d’un ton noble et fier, ce heros glorieux,
Respond à l’envoyé du monarque des cieux.
J’attaqueray, dit-il, la redoutable ville :
Où je voy de l’honneur, rien ne m’est difficile :
Et quand Cezar luy-mesme, avec tous les humains,
Deffendroit contre moy les hauts murs des Romains,
La frayeur sur mon front ne seroit jamais peinte :
Plus je verrois à craindre, et moins j’aurois de crainte :
Et devant obeïr à ce commandement,
A moy soit l’entreprise, à Dieu l’evenement.
L’ange estant satisfait de son obeïssance,
Disparoist, et retourne à l’eternelle essence :
Et ce corps lumineux, qu’il emprunta de l’air,
Se dissoud, et remonte, aussi prompt qu’un esclair.
Comme on voit quelquefois les corps mouvans des nuës,
Presenter à nos yeux cent formes inconnuës,
Et puis dans un moment, legerement passé,
Effacer aussi-tost ce qu’on y voit tracé :
Tel ce divin fantosme eut sa forme et son estre,
Il fut, il ne fut plus, et cessa de paroistre.