La pitié la surmonte, et dans cette aventure,
Sa générosité, le cède à la nature :
Et sentant que son coeur ne pourrait achever,
Oui (dit-elle) il faut vivre, afin de vous sauver.
Ainsi dans ce peril, et dans cette rencontre, [1620]
Elle prend un tapis que le bonheur lui montre,
L'attache à la fenêtre, en ces extrémités ;
Fait descendre au jardin ces deux jeunes beautés,
Les anime à cela, les soutient par derrière,
Enfin les met à terre, et descend la dernière. [1625]
Là, les arbres touffus, et l'ombre de la nuit,
En la favorisant font qu'elle les conduit,
Jusques au pavillon où Talerbal sommeille,
(c'est un vieux jardinier) elle appelle, il s'éveille ;
Il ouvre, elle entre, il reste étonné de la voir ; [1630]
Il lui promet pourtant, un fidèle devoir ;
Elle lui jure aussi, pourvu qu'elle me voit,
De le recompenser ; bref elle me l'envoye :
Il me trouve, j'y vais, je lui parle un moment ;
Je retourne aussitôt à mon appartement, [1635]
Afin de donner ordre aux choses nécessaires :
Ainsi voila l'état où j'ai mis nos affaires ;
Jugez après cela, si vous avez raison,
D'accuser vos amis, d'aucune trahison.
Pardonnez s'il vous plaît, à ma douleur trop forte. [1640]
Vous savez qu'un torrent quelques fois nous emporte,