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DES INSTITUTIONS D’ÉDUCATION

nécessaire en tout genre a quelque chose de révoltant quand ce sont les possesseurs du superflu qui le mesurent. Ce n’est pas assez de s’occuper des gens du peuple sous un point de vue d’utilité, il faut aussi qu’ils participent aux jouissances de l’imagination et du cœur. C’est, dans le même esprit que des philanthropes très-éclairés se sont occupés de la mendicité à Hambourg. Ils n’ont mis dans leurs établissements de charité, ni despotisme, ni spéculation économique ; ils ont voulu que les hommes malheureux souhaitassent eux-mêmes le travail qu’on leur demande autant que les bienfaits qu’on leur accorde. Comme ils ne faisoient point des pauvres un moyen, mais un but, ils ne leur ont pas ordonné l’occupation, mais ils la leur ont fait désirer. Sans cesse on voit, dans les différents comptes rendus de ces établissements de charité, qu’il importoit bien plus à leurs fondateurs de rendre les hommes meilleurs que de les rendre plus utiles ; et c’est ce haut point de vue philosophique qui caractérise l’esprit de sagesse et de liberté de cette ancienne ville anséatique.

Il y a beaucoup de bienfaisance dans le monde, et celui qui n’est pas capable de servir ses semblables par le sacrifice de son temps et de ses pen-