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DES POÈMES ALLEMANDS

a senti les rapports qui existent entre les dieux du nord et l’aspect de la nature à laquelle ils président.

Il y a une ode de lui, charmante, intitulée l’Art de Tialf, c’est-à-dire l’art d’aller en patins sur la glace, qu’on dit inventé par le géant Tialf. Il peint une jeune et belle femme, revêtue d’une fourrure d’hermine, et placée sur un traîneau en forme de char ; les jeunes gens qui l’entourent font avancer ce char comme l’éclair, en le poussant légèrement. On choisit pour sentier le torrent glacé qui, pendant l’hiver, offre la route la plus sûre. Les cheveux des jeunes hommes sont parsemés des flocons brillants des frimas ; les jeunes filles, à la suite du traîneau, attachent à leurs petits pieds des ailes d’acier, qui les transportent au loin dans un clin-d’œil : le chant des bardes accompagne cette danse septentrionale ; la marche joyeuse passe sous des ormeaux dont les fleurs sont de neige ; on entend craquer le cristal sous les pas ; un instant de terreur trouble la fête ; mais bientôt les cris d’allégresse, la violence de l’exercice, qui doit conserver au sang la chaleur que lui raviroit le froid de l’air, enfin la lutte contre le climat raniment tous les esprits, et l’on arrive au terme de la course, dans une grande salle