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DE L’ALLEMAGNE

pitié peut-être aussi du pauvre vivant. C’est un usage pieux des catholiques, et que nous devrions imiter, de laisser les églises toujours ouvertes ; il y a tant de moments où l’on éprouve le besoin de cet asile, et jamais on n’y entre sans ressentir une émotion qui fait du bien à l’âme, et lui rend, comme par une ablution sainte, sa force et sa pureté.

Il n’est point de grande ville qui n’ait un édifice, une promenade, une merveille quelconque de l’art ou de la nature, à laquelle les souvenirs de l’enfance se rattachent. Il me semble que le Prater doit avoir pour les habitants de Vienne un charme de ce genre ; on ne trouve nulle part, si près d’une capitale, une promenade qui puisse faire jouir ainsi des beautés d’une nature tout à la fois agreste et soignée. Une forêt majestueuse se prolonge jusqu’aux bords du Danube : l’on voit de loin des troupeaux de cerfs traverser la prairie ; ils reviennent chaque matin ; ils s’enfuient chaque soir, quand l’affluence des promeneurs trouble leur solitude. Le spectacle qui n’a lieu à Paris que trois jours de l’année sur la route de Long-Champ, se renouvelle constamment à Vienne dans la belle saison. C’est une coutume italienne que cette promenade de tous les jours à la même heure. Une--