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LA LITTÉRATURE ET LES ARTS

meurtre, et cependant il n’a pas le moindre doute sur la légitimité de sa résolution. Il compare l’innocent usage qu’il a fait jusqu’à ce jour de sa flèche à la chasse et dans les jeux, avec la sévère action qu’il va commettre : il s’assied sur un banc de pierre pour attendre au détour d’un chemin Gessler qui doit passer. — « Ici, dit-il, s’arrête le pèlerin qui continue son voyage après un court repos ; le moine pieux qui va pour accomplir sa mission sainte ; le marchand qui vient des pays lointains et traverse cette route pour aller à l’autre extrémité du monde : tous poursuivent leur chemin pour achever leurs affaires, et mon affaire à moi c’est le meurtre ! Jadis le père ne rentroit jamais dans sa maison sans réjouir ses enfants en leur rapportant quelques fleurs des Alpes., un oiseau rare, un coquillage précieux tel qu’on en trouve sur les montagnes ; et maintenant ce père est assis sur le rocher, et des pensées de mort l’occupent ; il veut la vie de son ennemi mais il la veut pour vous, mes enfants, pour vous protéger, pour vous défendre ; c’est pour sauver vos jours et votre douce innocence qu’il tend son arc vengeur. »

Peu de temps après on aperçoit de loin Gess-