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LUTHER

la situation ; c’est un autre genre de plaisir, ce n’est plus celui qui naît des émotions de l’âme ; car l’attendrissement ne peut exister sans la sympathie. L’on veut juger, sur la scène, les personnages comme des êtres existants : blâmer, approuver leurs actions, les deviner, les comprendre, et se transporter à leur place, pour éprouver tout l’intérêt de la vie réelle, sans en redouter les dangers.

Les opinions de Werner, sous le rapport de l’amour et de la religion, ne doivent pas êlre légèrement examinées. Ce qu’il sent est sûrement vrai pour lui ; mais comme, dans ce genre surtout, la manière de voir et les impressions de chaque individu sont différentes, il ne faut pas qu’un auteur fasse servir à propager ses opinions personnelles un art essentiellement universel et populaire.

Une autre production de Werner, bien belle et bien originale, c’est Attila. L’auteur prend l’histoire de ce fléau de Dieu au moment de son arrivée devant Rome. Le premier acte commence par les gémissements des femmes et des enfants qui s’échappent d’Aquilée en cendre ; et cette exposition en mouvement, non-seulement excite l’intérêt dès les premiers vers de la pièce, mais