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DE LA COMÉDIE

on auroit tort de pousser cette force jusqu’à braver la pitié ; l’art même en souffriroit, sans parler de la délicatesse ; car la plus légère impression d’amertume suffit pour ternir ce qu’il y a de poétique dans l’abandon de la gaieté.

Dans les comédies dont Kotzebue est l’inventeur il porte en général le même talent que dans ses drames, la connoissance du théâtre et l’imagination qui fait trouver des situations frappantes. Depuis quelque temps on a prétendu que pleurer ni rire ne prouvent rien en faveur d’une tragédie, ou d’une comédie ; je suis loin d’être de cet avis : le besoin des émotions vives est la source des plus grands plaisirs causés par les beaux-arts, il ne faut pas en conclure qu’on doive changer les tragédies en mélodrames, ni les comédies en farces des boulevards ; mais le véritable talent consiste à composer de manière qu’il y ait dans le même ouvrage, dans la même scène, ce qui fait pleurer ou rire même le peuple, et ce qui fournit aux penseurs un sujet inépuisable de réflexions.

La parodie, proprement dite, ne peut guère avoir lieu sur le théâtre des Allemands ; leurs tragédies, offrant presque toujours le mélange des personnages héroïques et des personnages su-