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DE LA LITTÉRARURE ET LES ARTS

qu’il interroge lui raconte la nature dans toute beauté ; mais il mêle à cette peinture une impression de mélancolie qui doit consoler l’infortuné privé de la lumière. Sans cesse il en appelle à la divinité, comme à la source vive des merveilles du mondes et ramenant tout à cette vue intellectuelle, dont l’aveugle jouit peut-être plus intimement encore que nous, il lui fait sentir dans l’âme ce que ses yeux ne peuvent plus voir.

Enfin je risquerai la traduction d’un morceau très-bizarre, mais qui sert à faire connoître le génie de Jean Paul.

Bayle a dit quelque part que l’athéisme ne devroit pas mettre à l’abri de la crainte des souffrances étemelles : c’est une grande pensée, et sur laquelle on peut réfléchir long-temps. Le songe de J. Paul, que je vais citer, peut être considéré comme cette pensée mise en action.

La vision dont il s’agit ressemble un peu au délire de la fièvre, et doit être jugée comme telle. Sous tout autre rapport que celui de l’imagination elle seroit singulièrement attaquable.

« Le but de cette fiction, dit Jean Paul, en excusera la hardiesse. Si mon cœur étoit jamais assez malheureux, assez desséché pour que tous