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LA LITTÉRATURE ET LES ARTS

l’Empire l’édit de paix perpétuelle qui défendoit tous les défis particuliers. Cet édit fut très-avantageux, sans doute, au repos de l’Allemagne ; mais les jeunes gentilshommes, accoutumés à vivre au milieu des périls et à s’appuyer sur leur force individuelle, crurent tomber dans une sorte d’inertie honteuse quand il fallut se soumettre à l’empire des lois. Rien n’étoit plus absurde que cette manière de voir ; toutefois, comme les hommes ne sont d’ordinaire gouvernés que par l’habitude, il est naturel que le mieux même puisse les révolter, par cela seul que c’est un changement. Le chef des brigands de Schiller est moins odieux qu’il ne le seroit dans le temps actuel, car il n’y avoit pas une bien grande différence entre l’anarchie féodale sous laquelle il vivoit et l’existence de bandit qu’il adopte ; mais c’est précisément le genre d’excuse que l’auteur lui donne qui rend sa pièce plus dangereuse. Elle a produit, il faut en convenir, un mauvais effet en Allemagne. Des jeunes gens, enthousiastes du caractère et de la vie du chef des brigands, ont essayé de l’imiter. Ils honoroient leur goût pour une vie licencieuse du nom d’amour de la liberté, et se croyoient indignés contre les abus de l’ordre social quand ils n’é-