Page:De Staël – La Révolution française, Tome I.djvu/146

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fini par faire admettre l’inconcevable maxime, Si veut le roi, si veut la loi, comme l’unique institution politique de la France.

Les Anglois, fiers avec raison de leur liberté, n’ont pas manqué de dire que, si les François n’étoient pas faits pour le despotisme, ils ne l’auroient pas supporté si long-temps ; et Blackstone, le premier jurisconsulte de l’Angleterre, a imprimé dans le dix-huitième siècle ces paroles : On pourroit alors emprisonner, faire périr ou exiler tous ceux qui déplairoient au gouvernement, ainsi que cela se pratique en Turquie ou en France[1]. Je renvoie à la fin de cet ouvrage l’examen du caractère françois trop calomnié de nos jours ; mais il me suffit de répéter ici ce que j’ai déjà affirmé, c’est que dans l’histoire de France on peut citer autant d’efforts contre le despotisme que dans celle d’Angleterre. M. de Boulainvilliers, le grand défenseur de la féodalité, ne cesse de répéter que les rois n’avoient ni le droit de battre monnoie, ni de fixer la force de l’armée, ni de prendre à leur solde des troupes étrangères, ni surtout de lever des impôts sans le consentement des nobles. Seulement il s’afflige un peu de ce qu’on a fait

  1. Liv. IV, chap. 27, § 5.