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CONSIDÉRATIONS

au roi les états généraux ? Membres des communes, répondez, je vous en conjure ; et si ma voix ose publier un mensonge, que la vôtre s’élève pour me confondre.

« Et sa retraite, messieurs, sa retraite avant-hier a-t-elle été celle d’un factieux ? Ses serviteurs les plus intimes, ses amis les plus tendres, sa famille même, ont ignoré son départ. Il a prétexté un projet de campagne ; il a laissé en proie aux inquiétudes tout ce qui l’approchait, tout ce qui le chérissoit ; on a passé une nuit à le chercher de tous côtés. Que cette conduite soit celle d’un prévaricateur qui veut échapper à l’indignation publique, cela se conçoit ; mais, quand on songe qu’il vouloit se dérober à des hommages, à des regrets qu’il eût recueillis partout sur son passage, et qui eussent pu adoucir sa disgrâce ; qu’il a mieux aimé se priver de cette consolation, et souffrir dans la personne de tous ceux qu’il aimait, que d’être l’occasion d’un instant de troubles ou d’émotion populaire ; qu’enfin le dernier sentiment qu’il a éprouvé, le dernier devoir qu’il s’est prescrit, en quittant la France d’où on le bannissait, a été de donner au roi et à la nation encore cette preuve de respect et de dévoue-