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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇOISE

lemens, composés de membres dont les charges étoient vénales, l’admirable institution des jurés, qui sera chaque jour plus vénérée, à mesure qu’on en sentira mieux les bienfaits. Quelques circonstances bien rares peuvent intimider les jurés, lorsque les autorités et le peuple se réunissent pour les effrayer ; mais néanmoins, l’on a vu la plupart des factions qui se sont emparées du pouvoir, se défier de l’équité des jurés, et les suspendre, pour y substituer des commissions militaires, des cours spéciales, des cours prévôtales, tous ces noms qui servent de déguisement aux meurtres politiques. L’assemblée constituante, au contraire, a restreint le plus qu’il étoit possible la compétence des conseils de guerre, les bornant uniquement aux délits commis par des militaires en temps de guerre et en pays étrangers ; elle a retiré aux cours prévôtales les attributions qu’on a voulu malheureusement rétablir depuis, et même étendre.

Les lettres de cachet permettoient au pouvoir royal, et par conséquent ministériel, d’exiler, de bannir, de déporter, d’enfermer pour sa vie entière, sans jugement, un homme quel qu’il fût. Une telle puissance, partout où elle existe, constitue le despotisme : elle devoit