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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇOISE

de Louis XV fût doué, il étoit difficile qu’il ôtât de l’esprit des hommes sérieux l’idée que des institutions fixes devoient mettre la France à l’abri des hasards de l’hérédité du trône. Plus cette hérédité même est nécessaire au bien-être général, plus il faut que la stabilité des lois, sous un gouvernement représentatif, préserve une nation des changemens dans le système politique, inséparables du caractère de chaque roi, et encore plus de celui de chaque ministre.

Certainement, s’il falloit dépendre sans restriction des volontés d’un souverain, Louis XVI méritoit mieux que tout autre ce que personne ne peut mériter. Mais l’on pouvoit espérer qu’un monarque d’une conscience aussi scrupuleuse, seroit heureux d’associer de quelque manière la nation à la responsabilité des affaires publiques. Telle auroit été, sans doute, sa manière constante de penser, si, d’une part, l’opposition s’étoit montrée, dès l’origine, avec plus d’égards ; et si, de l’autre, certains publicistes n’avoient pas voulu, de tout temps, faire envisager aux rois leur autorité comme une espèce d’article de foi. Les ennemis de la philosophie tâchent de représenter le despotisme royal comme un dogme religieux, afin de mettre ainsi leurs opinions politiques hors de