Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome I, 1807.djvu/281

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
277
CORINNE OU L’ITALIE

aide, et il se leva dans un transport insensé, puis se rassit, ramené à lui-même par les regards surpris de ceux qui l’environnaient ; mais son émotion devenait si forte qu’elle ne pouvait plus se cacher.

Au cinquième acte, Roméo, qui croit Juliette sans vie, la soulève du tombeau avant son réveil et la presse contre son cœur ainsi évanouie. Corinne était vêtue de blanc, ses cheveux noirs tout épars, et sa tête penchée sur Roméo avec une grâce et cependant une vérité de mort si touchante et si sombre, qu’Oswald se sentit ébranlé tout à la fois par les impressions les plus opposées. Il ne pouvait supporter de voir Corinne dans les bras d’un autre, il frémissait en contemplant l’image de celle qu’il aimait ainsi privée de vie ; enfin il éprouvait comme Roméo ce mélange cruel de désespoir et d’amour, de mort et de volupté, qui font de cette scène la plus déchirante du théâtre. Enfin quand Juliette se réveille de ce tombeau, au pied duquel son amant vient de s’immoler, et que ses premiers mots dans son cercueil sous ces voûtes funèbres ne sont point inspirés par l’effroi qu’elles devaient causer, lorsqu’elle s’écrie :

Where is my lord ? where is my Romeo ?